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Terroir Miquelon

Fin 2008, Leïla Meliani, originaire d’Algérie, et son conjoint, Stéphane, originaire de la Creuse, en France, arrivent à Saint-Pierre et Miquelon. Une escale, pour que Leïla puisse accoucher en sol français, avant que le couple ne reparte au Canada où ils ont choisi de s’installer pour devenir agriculteurs. Séduits par Miquelon et les possibilités qu’ils entrevoient dans leur domaine, ils restent. Un coup de chance pour l’archipel!

Viser le frais

Terroir Miquelon

Miquelon

Le couple avait élaboré un projet agricole en France, l’avait modifié en arrivant au Canada. Une fois, à Miquelon, il faut le retravailler encore, mais ils se mettent à l’oeuvre soutenus par les résidents, un peu épatés, sans doute, de voir des “Français de France” résolus à faire de l’agriculture chez eux.

“On s’est vite rendus compte que les fromages dans les magasins étaient très chers et pas très frais”, explique Leïla, “On s’est donc lancé dans une production laitière.” D’abord des vaches, pendant quatre ans, puis des chèvres.

Face à l’adversité

Peu après l’installation du couple, Stéphane meurt tragiquement d’un accident de travail au moment du défrichage d’un terrain. Consternée, la population de Miquelon se mobilise pour aider Leïla.

Je n’ai jamais été toute seule, j’ai eu beaucoup de soutien des habitants et ça m’a beaucoup portée.

N’ayant aucune envie de faire marche arrière, Leïla met toutes ses énergies au service de son exploitation, la Ferme du Grand Large. Un travail éreintant qui suppose les soins aux animaux, deux traites par jour entre la mi-avril et la mi-février (un peu moins pendant les deux mois qui restent), et la transformation de 100 à 150 litres de lait par jour en fromages. Tout cela sans vétérinaire à proximité et sans aucun autre fromager dans l’archipel. “On apprend à se débrouiller” explique Leïla, un commentaire qu’on entend souvent à l’Heure de l’Est de la part des petits exploitants à qui nous rendons visite, comme ses voisins de la Brasserie artisanale de l’Anse.

Un beau cheptel

 

Le chemin parcouru en dix ans est impressionnant. À la Ferme du Grand Large, il y a actuellement 44 chèvres en lactation, 3 boucs et 15 chevreaux (certains seront vendus pour la viande, d’autres serviront au renouvellement du cheptel.) Pour ceux que ça intéresse, ces chèvres sont de race Sanen (ce sont les blanches) et Togenbourg. Elles se sont bien adaptées au climat et sortent dès que le temps le permet. Leïla rêve aussi à des chèvres de race Alpine, comme celles de la ferme les Biquettes à l’air des Îles de la Madeleine, une race dit-elle qui se prête bien aux pâturages plus rustiques, comme ceux de Miquelon.

Beaucoup de travail

En plus, de façon à pouvoir rentabiliser son exploitation, Leïla élève aussi des poules fermières qu’elle nourrit aux céréales et au petit lait de ses chèvres. 10 à 12 semaines de travail supplémentaire avant l’abattage. Mais une opération lucrative car les résidents de Miquelon et de Saint-Pierre, avides de produits frais de qualité, réservent leurs poulets avant même qu’ils soient abattus.

Terroir Miquelon

Heureusement aussi, depuis 3 ans, Leïla peut compter sur l’appui d’un salarié toute l’année, cette année c’est une jeune diplômée en agriculture de la Sarthe, Sophie Buffin, qui l’assiste. C’est d’ailleurs ce qui lui a permis d’ajouter les poules à son exploitation. C’est aussi indispensable au développement de ses produits car la liste s’allonge, avec un nouveau produit tous les ans. “Il reste encore beaucoup à faire” ajoute Leïla, car comme toutes les personnes entreprenantes de notre région, elle ne manque pas d’ambition.

Du beau et du bon

Terroir Miquelon

En m’amenant dans son laboratoire, Leïla explique à la néophyte que je suis que sa production se divise en deux grandes catégories: les produits fromagers, yaourt, tomme, feta, camembert, et les lactiques: bûches, pyramides, crottins, affinés ou pas. La ferme vend beaucoup de frais mais certains fromages, la tomme par exemple, exige deux mois d’affinage, certains autres trois semaines..

Entre les traites et les différents temps de production et d’affinages, Leïla a construit un horaire de production où pas une journée ne ressemble à une autre.

Une clientèle conquise

Terroir Miquelon

La Ferme du Grand Large vend toute sa production localement à Miquelon et à Saint-Pierre et quand on trouve les fromages “de Leïla”, comme disent les habitants de l’archipel, on n’hésite pas avant d’acheter parce qu’ils ne font que passer.

Terroir Miquelon

Au début, il paraît qu’on disait que ça ne marcherait pas… mais ça marche. Moyennant beaucoup d’efforts, bien sûr, de renoncer au temps libre, aux vacances au soleil (ou même en Métropole) et à une paie assurée tous les mois.

Leïla ne s’en plaint pas! Elle fait manifestement ce qu’elle aime et poursuit, seule, fièrement, un rêve bâti à deux. Bravo!

 

Miquelon

Françoise Enguehard

Native de Saint-Pierre et Miquelon, Françoise est établie à Saint-Jean de Terre-Neuve depuis plus de quarante ans. Journaliste (anciennement à Radio-Canada, aujourd’hui chroniqueuse pour l’Acadie Nouvelle) , auteure reconnue, bénévole de la communauté francophone de l’Atlantique (Présidente de la Société Nationale de l’Acadie de 2006 à 2012 et de la Fondation Nationale de l’Acadie depuis 2014), elle connaît intimement la région de l’Heure de l’Est, ses gens et les défis qu’ils relèvent au quotidien. Femme d’affaires, elle dirige VIVAT Communications, une firme spécialisée dans la traduction et les communications.

One Comment

  • Kaltoum dit :

    Bonjour,

    Merci pour ce beau reportage.

    J’aimerais envoyer un message de soutien et d’admiration à Leila. Pourriez-vous m’indiquer son adresse mail ?

    Merci beaucoup

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