Skip to main content
Timbre de Saint-Pierre et Miquelon

Timbre commémoratif du Bicentenaire du retour des îles Saint-Pierre et Miquelon à la France

En voyage (où que ce soit dans le monde), si vous parlez de Saint-Pierre et Miquelon, deux choses peuvent arriver:

1. Votre interlocteur évoquera la Grand Pêche à la morue et son grand-père ou arrière grand-père Terre-Neuvas perdu dans les brumes des Grands Bancs, ou;

2. Elle ou lui vous parlera de sa collection de timbres de jeunesse, dans laquelle les timbres de Saint-Pierre et Miquelon occupaient une place importante.

La Grande Pêche n’est plus et les collections de timbres n’ont plus tout à fait la même popularité auprès des jeunes. Mais, vous allez le voir, la réputation des timbres de Saint-Pierre et Miquelon, elle, ne cesse de grandir.

L’historique

En 1816, l’archipel de Saint-Pierre et Miquelon redevient possession française de manière définitive après d’incessants conflits entre la France et l’Angleterre.

Il y avait fort à faire pour rebâtir la colonie abandonnée en 1793 et saccagée par la suite. Tout était à reconstruire, des maisons en passant par l’hôpital, les quais, les églises. Il fallait aussi pêcher et cultiver la terre (peu fertile, avouons-le!) pour tenter de ne pas mourir de faim et de froid.

Ce n’est donc qu’en en 1854 qu’on s’avisa d’ouvrir un service postal officiel. Ces premières années, les cachets administratifs faisaient office de timbre. Il fallut attendre 1859 pour qu’apparaisse l’usage des premiers timbres. En 1885, le gouverneur des îles décide de personnaliser les vignettes postales. On recouvre donc les timbres d’une surcharge manuelle. Ainsi la philatélie de Saint-Pierre et Miquelon naissait!

Timbres de Saint-Pierre et Miquelon

Le marin – Premier timbre local

C’est en 1909, soit près d’un siècle après l’installation définitive de la France à Saint-Pierre et Miquelon, qu’apparaissent enfin les timbres de Saint-Pierre et Miquelon avec un visuel propre:

Le premier, c’est ce marin pêcheur, qui sera suivi du goéland et de la goélette de pêche. Ces trois visuels se déclinent en diverses couleurs et valeurs.

Les dessins sont réalisés en France par des artistes qui n’ont aucun lien avec Saint-Pierre et Miquelon. Leurs réalisations s’inspirent des dessins populaires en France à cette époque, comme l’illustre bien le portrait du pêcheur ci-contre.

Mais, pour la première fois, la mention « Postes – Saint-Pierre et Miquelon » indique que l’archipel dispose de sa philatélie propre.

Une production soutenue

Jusqu’en 1986, les timbres de Saint-Pierre et Miquelon sont ceux dits « des colonies ».

Il s’agit de timbres dessinés et réalisés en France pour La Poste sur un thème précis et ensuite déclinés au nom des diverses possessions de la France à travers le monde – Guyane, Guadeloupe, Martinique et Saint-Pierre et Miquelon, par exemple.

C’est le cas de ce timbre sur l’exposition coloniale internationale de 1931. Le moins qu’on puisse dire c’est que la population de l’archipel ne devait pas s’y reconnaître!

En 1932, grande nouveauté, on émet un timbre avec la carte de l’archipel, mais jusque-là la philatélie locale ne brille pas par son originalité.

Au tout début des années 1940, les choses vont évoluer de manière extraordinaire.

La France-Libre

Le 24 décembre 1941, sous ordre du Général De Gaulle et sous le commandement de l’amiral Muselier, trois corvettes « Aconit« , « Alysse » et « Mimosa » escortées par le sous-marin « Surcouf » arrivent dans le port de Saint-Pierre et prennent possession de l’archipel au nom de la France Libre.

Le 29 décembre 1941, l’administrateur adressa au siège de la France Libre, à Londres, le télégramme suivant: Avons surchargé en rouge 1500 séries en vente jusqu’au 5 janvier, en noir 500 séries Noël 1941 France Libre F.N.F.L. stop Surchargeons tout stock timbres soit 800 000 francs France Libre Stop Prévoir envoi nouveaux timbres

Timbres France Libre

L’âge d’or des timbres de Saint-Pierre et Miquelon vient de commencer! Comme l’indique le télégramme, tous les timbres sur place vont être surchargés pour y ajouter le mot « France Libre ». Plus tard, et jusqu’en 1945, la France Libre émettra de nouveaux timbres avec la mention « France Libre » et la Croix de Lorraine.

Tous ces timbres sont intéressants et fascinent les collectionneurs. Dans le palmarés des timbres les plus précieux de Saint-Pierre et Miquelon, se trouve, en 3ème position, le timbre France Libre d’une valeur de 3 francs, couleur sepia, de 1942, dont il n’existe que 27 exemplaires.

« Pourquoi 27 exemplaires? » demandez-vous? En tous les cas, c’est la question que je me suis posée! La réponse de Jean-Jacques Tillard, grand expert local (et mondial): tout simplement parce qu’il n’y avait que 27 timbres de ce type au bureau de poste!

L’ère moderne

Après l’époque de la France Libre, la philatélie reprend son petit bonhomme de chemin. Les timbres sont conçus et produits en France et envoyés dans l’archipel. Cette fois, les illustrations sont reliées directement à la vie des îles, à la flore, la faune, par exemple, ce qui leur donne déjà un cachet particulier.

Timbres des années 1970

En 1976, Saint-Pierre et Miquelon devient un département d’Outre-Mer. Ce changement très administratif (et, si ma mémoire est bonne, peu apprécié de la population) a la fâcheuse conséquence de priver l’archipel de son droit de produire des timbres. Fort heureusement pour les collectionneurs, cette situation ne dure pas et, en 1985, les îles deviennent une Collectivité territoriale, son statut actuel.

Ouf, la production de timbres peut reprendre! Cette fois, les artistes locaux seront mis à l’honneur, tout comme la culture, les gens, le patrimoine et les divers moments forts de la vie locale. Parfois même, le timbre s’intéresse à la grande région atlantique avec des thèmes comme le Régiment Royal de Terre-Neuve ou encore l’Explosion d’Halifax.

timbre explosion d’Halifax

Une commission philatélique est créée, gérée par la Collectivité Territoriale (le gouvernement local, si vous préférez). Elle réunit des conseillers territoriaux, des artistes, des représentants du Club philatélique et des responsables de la Poste. Parfois aussi un représentant de l’État ou du tourisme y assistent. C’est cette commission qui décide quels thèmes mettre en valeur sur les quelque 20 à 25 timbres produits annuellement.

 

 

Le maintien de la tradition

Si les timbres de Saint-Pierre et Miquelon sont si populaires c’est, bien sûr, parce qu’il existe bien peu d’autres endroits aussi petits au monde qui émettent encore des timbres, mis à part les îles anglo-normandes.

Mais ce qui plaît aussi beaucoup aux collectionneurs, c’est que chaque année Saint-Pierre et Miquelon offre son lot de timbres originaux, tant par leur sujet que par leur facture et leur qualité artistique.

Un des aspects fascinants de ces timbres, c’est aussi qu’ils perpétuent une tradition délaissée par bien des pays, la taille douce. Il s’agit d’une technique plus onéreuse mais qui donne un très beau rendu.

Des 20 à 25 timbres produits annuellement, au moins 7 sont en taille douce. Une technique exigeante pour l’artiste qui produit l’illustration et que pratique l’artiste saint-pierrais patrick Dérible.

Une popularité croissante

Jean-Jacques Tillard

Tout cela fait de l’archipel un endroit intéressant pour les philatélistes aujourd’hui. Cet engouement est aussi beaucoup dû à Jean-Jacques Tillard, natif de Saint-Pierre, qui de simple passionné du timbre est devenu un expert international. Depuis des années, il parcourt la planète pour participer aux compétitions philatéliques et accumulant les honneurs, le plus récent il y a quelques semaines en Estonie.

C’est à lui qu’on doit aussi l’organisation, avec l’aide du Club philatélique, des premières expositions philatéliques internationales réalisées à Saint-Pierre et Miquelon. La dernière édition prévue en juin 20020, a due être annullée pour cause de pandémie!

Son travail sur les timbres de l’archipel a mené à plusieurs ouvrages, sur les timbres de la France Libre ou encore le catalogue de cotation des timbres de l’archipel.

Si les jeunes ne s’intéressent plus comme autrefois à la philatélie, Jean-Jacques confirme que le timbre demeure l’objet le plus collectionné au monde et qu’il est tout particulièrement apprécié comme objet d’art rare.

Et les passionés ne rechignent pas: le timbre le plus rare de Saint-Pierre et Miquelon vaut entre 20 000 et 30 000 euros. Une fortune, soit mais tout est relatif. Le timbre le plus rare au monde, émis en Guyane Britannique, vaut 7 millions de dollars américains!

 

(vous utilisez Pinterest? Merci d’épingler)

 

 

Françoise Enguehard

Native de Saint-Pierre et Miquelon, Françoise est établie à Saint-Jean de Terre-Neuve depuis plus de quarante ans. Journaliste (anciennement à Radio-Canada, aujourd’hui chroniqueuse pour l’Acadie Nouvelle) , auteure reconnue, bénévole de la communauté francophone de l’Atlantique (Présidente de la Société Nationale de l’Acadie de 2006 à 2012 et de la Fondation Nationale de l’Acadie depuis 2014), elle connaît intimement la région de l’Heure de l’Est, ses gens et les défis qu’ils relèvent au quotidien. Femme d’affaires, elle dirige VIVAT Communications, une firme spécialisée dans la traduction et les communications.

508 Comments

Publier un commentaire