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L’idée d’un village historique acadien est née, il y a 50 ans, pour encourager le tourisme. Le concept était fort simple: amener des visiteurs en Acadie du Nouveau-Brunswick, leur raconter l’histoire et contribuer à la préservation du patrimoine. Ouvert en 1977, le site n’a cessé de se développer. Suivez-moi dans cette promenade insolite à travers 4 siècles d’histoire et un patrimoine vivant.

Ici, au “Village” comme on dit, à quelques minutes à peine de Caraquet, se trouvaient autrefois des champs asséchés par les Acadiens à la fin des années 1700. La découverte de 22 aboiteaux en fait foi.

En amenant les visiteurs au Village historique acadien, on leur fait donc fouler un sol déjà travaillé de longue date. Ce détail donne à l’expérience un cachet authentique, avant même d’avoir commencé la visite.

Un parcours ressourçant

Une fois que vous aurez garé votre véhicule, payé vos frais d’entrée et poussé la porte menant au site, votre environnement changera brutalement. Le sentier qui s’ouvre à vous sillonne entre champs et boisés. Ça sent bon le foin et le bois qui brûle, le sous-bois et la bouse de vache. Le bruit de vos pas et le chant des oiseaux se mêlent au bruit des feuilles dans le vent, au bêlement lointain d’un mouton ou au cri d’un coq. En avant pour l’aventure!

En moins d’une minute, je vous le garantis, la vie ralentit, surtout si vous visitez en tout début de matinée avant les foules

Sur 2, 5 kilomètres de sentier, une quarantaine d’arrêts s’offrent à vous. Vous marcherez, à votre rythme, dans l’ordre ou dans le désordre, c’est à vous de voir.

patrimoine vivant

Pour ma part, je l’ai fait dans l’ordre, c’est à dire chronologiquement. Maisons, fermes, granges, entrepôts, jardins, fours à pain, un hôtel, une gare, un pont couvert, une église, et j’en passe, vous mèneront, tout doucement, de 1770 à 1950.

Les 3/4 de ces bâtiments sont d’époque. Ils ont été collectés un peu partout, démontés et rebâtis ici même. Le reste a été construit à l’identique.

Du vrai monde

Ne cherchez ni casques audio, ni guide papier (tout juste un plan du site), ni guide tout court (sauf si vous êtes un grand groupe et demandez le service).

Le visiteur va à la rencontre d’Acadiennes et Acadiens qui, habillés selon une époque précise, vaquent aux occupations qui étaient autrefois celles de leurs ancêtres.

patrimoine vivant

Ils sont plus d’une centaine, âgés entre 15 et 80 ans. Tous ont une identité, un métier ou une occupation bien à eux qu’ils conservent toute la saison et parfois même des années. Leur nom et leur histoire sont ceux de la personne qu’ils incarnent et ils ne vous parleront que de choses liées à l’époque dans laquelle ils vivent.

patrimoine vivant

C’est si vrai que, dans la première maison qui date de 1773 (un bâtiment d’origine), le résident est un homme bien seul.

Des 14 cuisinières que compte le village, il est le seul homme à se faire à manger car son personnage est veuf.

Plus encore, comme il habite la seule maison du dix-huitième siècle, il ne peut pas inviter d’autres collègues (du dix-neuvième ou vingtième siècle) à partager sa table!

C’est peut-être mieux ainsi, parce que, de toutes évidences, le pauvre n’a pas grand moyen!

Les bonnes odeurs!

Si je vous invite à visiter le village tôt en matinée, ce n’est pas seulement pour éviter la foule. C’est aussi pour les odeurs: celle du feu qui brûle dans les cheminées, les foyers et les poêles (selon l’époque de chacune des maisons), celle du pain qui cuit dans le four extérieur et celles des divers repas de midi en train de mijoter dans les chaudrons.

patrimoine vivant

En effet, mis à part l’infortuné veuf de la maison Martin, chaque cuisinière nourrit de 2 à 6 personnes qui travaillent aux alentours. Les mets sont traditionnels, confectionnés avec les ingrédients disponibles au village et avec les ustensiles d’époque, (pas de tasses à mesurer, on fait à l’oeil!)

Dans le droit fil de la philosophie du village, la conversation autour de la table de midi ne concernera que le quotidien de l’époque. Ceci dit, ce ne sont pas les sujets qui vont manquer…

Tout le monde au travail

Au village, en plus d’accueillir le visiteur et d’évoquer le patrimoine, chacun s’active “pour de vrai”. Les cultures, les foins, les bêtes, les gens, ça crée beaucoup d’ouvrage.

Et les bêtes, il y en a: des moutons, des poules et des coqs, des canards et des oies, un âne, des cochons et une vache portant le joli nom d’Antoinette qui vit au Village depuis sa naissance.

L’hiver, Antoinette va en pension, tout comme l’âne d’ailleurs. Le reste du bétail est vendu à l’encan pendant la foire agricole de l’automne (on vous en reparlera, c’est promis).

Justement, Antoinette vient d’avoir un petit, ce qui amène près de son enclos tous les enfants en visite pour la journée.

Il faut aussi s’occuper des jardins, des champs, du foin, du bois à couper, nettoyer les étables, amener l’eau dans chacune des maisons, rentrer le bois de chauffage et veiller au feu dans le foyer, laver le linge, la vaisselle, tisser, coudre …

patrimoine vivant

D’une maison à l’autre, au milieu d’un champ ou d’un jardin, dans le bâtiment des pêcheurs et des constructeurs d’embarcations, dans une étable ou à la taverne, on vous expliquera les métiers et savoirs-faire indispensables pour vivre, se nourrir et prospérer. Vous n’êtes pas au bout de vos découvertes.

Il y a d’ailleurs tant à apprendre que je vous réserve un second article consacré aux quelque 20 métiers et savoirs-faire en montre au Village historique acadien.

Chemin faisant…

Prenez votre temps pour parcourir le village. (d’un côté pratique, Il y a quelques points pour prendre une pause, pour manger un morceau. Si vous êtes fourbu, un service de navette peut aussi vous ramener au centre d’accueil).

La section dix-neuvième siècle invite à flâner. Outre les habitations, il y a une forge, une menuiserie, une taverne, une église, une école (la maîtresse n’a pas la vie facile, je vous l’assure!) et un magasin général tenu par une charmante dame qui fait très bien l’article!

 

patrimoine vivant

Vous pourrez aussi rendre visite à l’imprimeur qui publie le Moniteur Acadien, le premier journal acadien encore en existence aujourd’hui, dont nous vous parlions il y a quelques mois.

Et ainsi doucement, vous arriverez au pont couvert . En le traversant, vous entrerez directement dans l’Acadie du vingtième siècle.

patrimoine vivant

La station-essence Irving est d’époque (1936), l’hôtel Château Albert tout à côté est une reconstruction faite avec les plans de l’hôtel original (1907) de Caraquet, détruit par un incendie il y a bien longtemps.

Dans cette section vingtième siècle, vous trouverez une gare, un magasin général, un moulin à bois, un cordonnier, un tonnelier, un ferblantier. Dans les maisons, les poêles à bois ont remplacé les cheminées, mais ici aussi, on cuisine pour les ouvriers et chacun a fort à raconter tous les midis.

Encore quelques pas et vous reviendrez au centre d’accueil pour reprendre pied dans la réalité de notre époque!

Des petits plus

Vous voulez rester après la fermeture? Vous pouvez louer une chambre à l’hôtel Albert.

Soif après toute cette promenade? Prenez un verre au bar de l’hôtel avant de quitter le vingtième siècle.

Le studio photo Le Daguerre vous permettra d’immortaliser votre passage.

Et puis, pourquoi ne pas vous inscrire à un cours de cuisine traditionnelle?

Il y a aussi une ferme pour les petits. Dans le centre d’accueil, une boutique vend certains articles faits à la main sur place (à midi on y vend du pain traditionnel cuit dans le four communautaire du village!). Il y a aussi un café-bistro. Enfin, on propose des fauteuils motorisés pour les visiteurs à mobilité réduite.

Au Village historique acadien, on a pensé à tout pour que cette visite à travers le patrimoine vivant de l’Acadie se fasse dans les meilleures conditions.

Village historique acadien

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Françoise Enguehard

Native de Saint-Pierre et Miquelon, Françoise est établie à Saint-Jean de Terre-Neuve depuis plus de quarante ans. Journaliste (anciennement à Radio-Canada, aujourd’hui chroniqueuse pour l’Acadie Nouvelle) , auteure reconnue, bénévole de la communauté francophone de l’Atlantique (Présidente de la Société Nationale de l’Acadie de 2006 à 2012 et de la Fondation Nationale de l’Acadie depuis 2014), elle connaît intimement la région de l’Heure de l’Est, ses gens et les défis qu’ils relèvent au quotidien. Femme d’affaires, elle dirige VIVAT Communications, une firme spécialisée dans la traduction et les communications.

8 Comments

  • Raymonde dit :

    J’y vais 3 a 4 fois par saison et j’en apprends touujours. Votre facon de raconter est belle et simple. J’ai eu vraiment beaucoup de plaisir a vous lire. Merci.

  • Le Village Historique Acadien c’est plus que ça c’est l’histoire de vos ancêtres à votre porté. Vous n’avez qu’à tendre l’oreille pour les entendent vous raconter leur histoires. Ils ne demandent qu’à vous faire partager leur vécu et leur vie dont vous faites partie…

    • Françoise Enguehard dit :

      Vous avez tout à fait raison et c’est pour ça que nous préparons un autre article sur le Village qui portera, cette fois, sur les métiers et les savoir-faire que présentent les interprètes, avec quelques savoureux vidéos, en plus!

  • Lucie LeBouthillier dit :

    A lire l’article, on se sent là. On fait la visite avec les images, les odeurs et les gens. Bravo Françoise, comme à l’habitude tu captures notre intérêt.

  • TRAON Alain dit :

    J’ai été ému par cette phrase

    la première maison qui date de 1773 (un bâtiment d’origine),

    C’est l’année exacte qui figure au dessus de la porte de la maison de mes ancêtres à Trébédan en France!
    Certaines constructions encore en état sont plus anciennes mais cette coïncidence m’a touché.

    Amaicalement

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