Le P’tit Gravier vient de reprendre ses liaisons estivales entre Saint-Pierre et l’Île aux Marins, le printemps s’installe, les musées ré-ouvrent et les résidents reprennent possession de leurs maisons, fermées pour l’hiver.
La Grande Hermine claque au vent. Au bout du mât, un drapeau grand comme un drap flotte sur le ciel sans nuage. À côté une petite paire de pieds, rouges, trépigne sur le même fond.
C’est le printemps, la première belle journée de la saison et à l’Île aux Marins la vie retrouve ses droits : l’hibernation est terminée.
Petite langue de terre posée à l’entrée du port de Saint-Pierre, l’île, autrefois village de pêcheurs et aujourd’hui fierté locale est en train de reprendre ses couleurs.
1. Une navette très sollicitée
Quinze petites minutes, c’est tout ce que dure une traversée sur le P’tit Gravier, aujourd’hui plein “à bloc”.
Le port de Saint-Pierre s’éloigne, sur une eau cristalline.
Le petit traversier se retrouve face au rivage de l’île aux Marins presqu’aussitôt. La distance entre les deux quais est infime.
En compagnie de jeunes élèves canadiens en séjour linguistique et de résidents chargés de sacs cabas, on a à peine le temps de savourer la trop courte balade en mer ! Le P’tit gravier accoste déjà.
Ça fait seulement quelques jours que la météo permet des rotations régulières (enfin, presque régulières) entre le port de Saint-Pierre et le quai de l’Île aux Marins. Les résidents, ceux qui s’appellent eux-mêmes les Pieds Rouges, peuvent réinvestir leurs quartiers d’été. Nous sommes en mai, c’est le moment d’ouvrir tranquillement les maisons de l’Île aux marins et de redonner vie à la belle endormie.
À peine à quai, Anne Salomon, conservatrice du musée pour le compte de l’association Sauvegarde du Patrimoine de l’Archipel, brandit un lourd trousseau de clés.
“Quand j’arrive chaque matin, c’est ma routine, je commence par ouvrir tous les bâtiments. L’île a beau être petite, ça me maintient de forme” plaisante-t-elle. Effectivement, elle en fait des aller-retours ! Pas de véhicule, même pas de vélos, mais des chemins herbeux qui serpentent entre les anciennes graves. Et des brouettes à disposition, si nécessaire.
“Comme chaque printemps, il a fallu tout remettre en place, réinstaller une partie des collections, ôter les tissus mis aux fenêtres pour protéger le contenu des 28 salles d’exposition des rayons du soleil hivernal. Aérer le tout et s’assurer que l’hiver n’a pas fait de dégâts.”
Un petit bonjour à Géraldine déjà en pleine action à la cafétéria de la Maison Jézéquel, – à midi ça sera boulettes de morue, il en faudra une bonne centaine.
Et on démarre la tournée : La maison grise, le musée Archipelitude, l’atelier, le garage des pompes, l’église … Ces lieux témoins d’un passé pas si lointain racontent aux visiteurs d’un jour une histoire qu’ils sont loin de pouvoir imaginer.
2. Le petit peuple de l’île aux marins
En voyant cette poignée de maisons pimpantes et bien entretenues comment pourraient-ils se douter que l’île a abrité une communauté de plusieurs centaines de pêcheurs avec leurs familles ? Une église, une école, un lavoir mais aussi un café “et même un magasin de tissu ! ” précise Martine qui nous avait fait signe depuis le balcon de sa maison de poupées.
Elle nous raconte que sa maison, au moment de son achat était encore pleine des effets personnels des anciens occupants, partis vivre à Saint-Pierre quand l’île a été peu à peu abandonnée par ses habitants. “Ils avaient tout laissé, … Un manteau de fourrure et même plusieurs chapeaux !” Des chapeaux ? Accessoires certes classiques dans les années d’après-guerre, on a du mal à imaginer à quelles occasions les femmes pouvaient les porter ici, à l’île aux marins. Mais comme partout ailleurs ! Pour aller à la messe bien sûr !… pour l’arrivée du bateau, ou faire des courses “en ville”, à Saint-Pierre.
On imagine cette vie rude d’îliennes qui offrait pourtant son lot de plaisirs, comme celui d’une belle toilette.
Depuis 3 ans, avec Philippe, son mari, et une patience quasi extra-terrestre, Martine a entrepris de restaurer cette maison centenaire. Du temps investi, de la passion, et un coup de foudre pour l’île aux marins.
Elle doit avoir les muscles douloureux certains soirs, mais on aimerait quand même être à sa place, au moment où les touristes partent sur la dernière navette.
Les résidents, eux, restent, gardiens d’un microscopique royaume entre le ciel et l’eau. Quand le soleil se couche derrière Savoyard, que les lumières s’allument à Saint-Pierre et que plus une voix ne trouble l’air de l’île, on aimerait bien s’asseoir avec Martine et écouter le ressac.
3. Une équipe technique très occupée
Sur notre périple l’unique véhicule de l’Île aux Marins nous rattrape : un petit tracteur qui arrive de chez Gérard, nouveau résident sur l’île. Il est en plein travaux de rénovation, lui aussi.
“On donne un coup de main pour monter les barres d’échafaudage jusque chez Gérard et lui, il nous transporte du matériel sur son bateau. L’île est petite, on s’entraide” explique Yannick. Foulard de corsaire sur la tête, ça fait plusieurs années qu’il est dans le service technique indispensable au bon fonctionnement de l’île, il la connait dans ses moindres recoins.
Des bâtiments tout en bois, des intempéries hivernales sans répits, tous les printemps un état des lieux minutieux s’impose.
Cet hiver le vent a été si fort qu’il s’en est pris à un mur pourtant refait l’été dernier, des bardeaux ont pris le vol, il faut réparer ça. Mais avant, ou pendant, ou en même temps, il faudra finir la toiture de la maison bleue, et résoudre les multiples petits tracas du quotidien.
Avec toujours un défi de taille : pas d’eau courante, pas d’électricité et pas de quincaillerie à portée de main. Planification et débrouillardise ! Finalement, ça ne doit pas vraiment changer du 19ème siècle !
Yannick et son collègue Jordan ne sont pas au bout de leurs peines ! Depuis que l’île est devenue l’une des attractions touristiques principales de l’archipel, elle est l’objet de toutes les attentions, au plus haut niveau.
Cet hiver, une première mission visant à un classement à l’Unesco pour Saint-Pierre et Miquelon s’est rendue sur l’archipel. Voilà l’île aux marins portée sur un piédestal et le patrimoine de nos îles qui pourrait se retrouver à un échelon de reconnaissance international. Un projet de haut vol qui devra mobiliser tout l’archipel.
Des perspectives qui ont de quoi donner le tournis à l’équipe de maintenance de l’île ! Pour l’heure, les ouvriers gardent la tête froide, la préoccupation est à la saison estivale. Il faut que tout soit parfait pour les premiers visiteurs de l’été, bientôt, très très bientôt !
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Trop court cet article sur l’île aux marins : il y a tant à dire sur ce lieu … juste une mise en bouche avant l’été ?
Mais très très bien cet article. L’ile aux Marins : le meilleur endroit pour comprendre et voir ce qu’étaient les conditions de vie et de travail des pêcheurs de morue du littoral atlantique.
Jean Chapelot
Ah oui !… il y a beaucoup plus de choses à dire. C’était juste un petit article pour tenter de donner l’ambiance de début de saison quand l’Ile aux Marins se réveille au printemps.
Bonjour
Mon rêve venir un jour sur cet archipel
Je suis régulièrement vos nouvelles
Merci de donner de la couleur à mes rêves
Bien cordialement
Béatrice