Avez-vous entendu parler du swing des Îles-de-la-Madeleine ? Swing, ça veut dire balancer. D’avant en arrière. Passé, présent. Patrimoine, création. Violon, guitare. Poésie, humour.
On évoque les Îles-de-la-Madeleine et tout de suite on voit tout à la fois : le Saint-Laurent, les dunes de sable, les falaises rouges, la mer, les homards et … les artistes. Ou plus largement, la culture; le bouillonnement culturel.
Les Îles-de-la-Madeleine ne sont pourtant pas une cocotte minute, … elles seraient plutôt une mijoteuse où des ingrédients s’ajoutent et se bonifient avec le temps et avec le vent.
Georges Langford, le Brassens des Îles-de-la-Madeleine
Étés 2021 et 2022 : les madelinots et les touristes se pressent au Vieux Treuil pour “À travers le hublot », la série de concerts hommages à l’un des artistes les plus marquants des Îles-de-la-Madeleine. 7 chanteuses et chanteurs et musiciens madelinots célèbrent les 50 ans de chansons de celui qu’ils qualifient de « pilier artistique de l’Acadie et des Îles », le Brassens madelinot, Georges Langford.
Conviez des madelinots autour d’un feu de camp. Ils viendront avec des instruments de musique et ils se mettront à chanter avant même que la braise ne rougeoie. Parmi les chansons que tous connaitront par coeur il y aura forcément des chansons de Georges Langford. La Butte, Le Tour des Maisons, les incontournables Acadiana ou le Frigidaire, ou encore ma préférée, celle qui me fait pleurer à chaque fois : 48 degrés et des étoiles, une chanson commandée par les organisateurs de la transat Québec – Saint-Malo de 1984. Un monument de douceur et d’espoir. Allez l’écouter sans faute !
Photo CFIM Pierre Aucoin
" Quand on écoute
le répertoire de
Georges Langford
on comprend ce que
c'est que vivre aux
Îles-de-la-Madeleine."
Enfant du pays, en seulement 5 albums, il s’est taillé une place d’incontournable sur la scène culturelle des îles, du Québec et de la francophonie canadienne. En quelques dizaines de chansons gravées sur du vinyle (et beaucoup d’inédites dans les tiroirs), des musiques de films et plusieurs ouvrages de poésie, Georges Langford a posé des mots et des mélodies sur la vie insulaire.
Des mélodies qui ont dû faire sangloter des générations de madelinots partis vivre “en ville”, à Montréal ou ailleurs, tant on y entend le souffle du vent d’hiver, le ressac des jours de mauvais temps et les soirées de fête des fins de semaine dans les maisons des uns et des autres. On y entend le chant des îles, cet “instrument à vent de 100 kilomètres de long“.
“Dans les familles on l’écoute beaucoup. Il chante les madelinots et tout le monde se reconnait dans ses chansons.Quand on écoute le répertoire de Georges Langford on comprend ce que c’est que vivre aux Îles-de-la-Madeleine.” explique Annie Vigneau, l’une des artistes du spectacle hommage.
Il faut croire qu’il a fait le bon choix quand aux premières années de sa carrière, il a finalement décidé de quitter Montréal, là où tout se joue pourtant. Direction “retour à la maison”, à Havre-Aubert. D’abord pour un hiver, pour se retrouver enfin chez lui après des années continentales, au Nouveau-Brunswick et à Montréal.
Un hiver qui se poursuit toujours puisqu’il n’est jamais reparti. C’est là que sont ses racines et c’est là qu’est sa mémoire. Né en 1948, il précise avec malice qu’il a connu les îles avant l’arrivée de l’électricité, et il n’est pas peu fier de ce qu’elles sont devenues. Georges Langford ne le dit pas lui-même mais tous ont les mêmes mots : il est l’un des artisans de ce dynamisme culturel. Très actif, les Îles lui doivent encore plus que ses textes et ses mélodies : les boites à chansons, la mise en avant des artistes, jusqu’à la création de la radio CFIM dans les années 80.
Marie-Ève Laure, le choix des Îles-de-la-Madeleine
C’est un fait, ces îles-là, aussi petites soient-elles, présentent une concentration d’artistes au mètre carré qui donne le tournis; dans toutes les maisons il y a des instruments de musique. Les party de cuisine acadiennes sont là aussi. Plus qu’un folklore, elles sont une réalité du mode de vie insulaire madelinot. Musique traditionnelle, musique des maritimes, musique du Cap Breton (aux accents écossais) on trouve tout ce métissage là aux îles.
D’ailleurs, quand on discute avec Marie-Ève Laure on se demande si les Îles-de-la-Madeleine ne serait pas l’endroit au monde où on vit le plus heureux. « Le Paradis des musiciens ».
Originaire du continent, mais avec des racines madeliniennes elle fait partie de la relève de la scène artistique des îles. À force d’aimer y passer ses vacances, au moment de la pandémie elle a décidé de sauter le pas et de s’y installer à l’année. C’était une grande décision, quand, comme Georges Langford, elle s’est dit que le rythme fou de Montréal n’était peut-être plus pour elle douze mois sur douze. « La qualité de vie, c’est ce qui compte le plus » confie-t-elle. ça ne l’empêche pas d’être pleine de projets et de retourner sur le continent quand il le faut.
Marie-Ève Laure, vous l’avez peut-être vue et entendue. Sur le plateau de The Voice en France en mars 2022, par exemple.
Marie-Ève est une boule d’énergie avec une voix puissante, à la québécoise. Originaire d’une famille de chansonniers elle écrit ses paroles et ses musiques. Prenez le temps d’aller écouter ses chansons, vous les trouverez sur toutes les plateformes.
Elle s’est installée aux île avec tellement d’enthousiasme qu’elle en a même été ambassadrice pendant un an pour l’un des programmes d’attractivité du territoire.
Elle aussi est dans le swing des Îles-de-la-Madeleine : si elle figurait parmi les 7 artistes madelinots sur scène pour célébrer Georges Langford, elle apporte aussi aux îles à la fois ses influences country, les notes de jazz de Fred Pauze, son compagnon lui aussi musicien, et des rythmes acadiens.
Le Café de la Grave, incontournable de la scène madelinienne a encore de beaux jours devant lui avec des artistes bourrés de talents. Originaires des îles, ou pas, tous trouvent l’inspiration dans le cadre paisible et énergisant des îles !
La Mission Sacrée des Souvenances
Même chemin ou presque pour Jean-Philippe Bénard, l’un des 3 fondateurs de la maison de production Parages.
Musicien (tiens, tiens …) il quitte son archipel en 2005 pour aller « en ville ». À l’arrivée de son premier bébé il entend l’appel des îles et le voilà qui rentre au bercail en 2019 avec sa petite famille.
Photo Co-op FOËNE
" Mais c’est (...) par la musique, et par les liens sociaux et amicaux qu’elle tisse, qu’ils ont tenu bon."
Épris, lui aussi, de patrimoine et des chansons qui font la culture acadienne des Îles-de-la-Madeleine il apprécie d’autant plus de retrouver la « jouerie » si particulière des madelinots.
« La vie était très dure ici dans l’temps. Les gens étaient pauvres et les conditions de vie étaient rudes. Mais c’est aussi par la musique, et les liens sociaux et amicaux qu’elle tisse, qu’ils ont tenu bon. La musique, c’était comme pour les chansons dans les champs de coton des esclaves : c’était un échappatoire. Se rassembler, pour décompresser. On y trouve un rythme, une cohésion, un ciment social ».
En d’autres mots, si la société des Îles-de-la-Madeleine est ce qu’elle est aujourd’hui, elle le doit beaucoup à sa culture musicale.
Illustration Alexandra Dion-Fortin
Ce patrimoine précieux doit être « encapsulé » c’est maintenant chose faite.
Le voilà en vidéo, un(e) artiste, son instrument, son témoignage et ses « tounes ».
Vous allez les trouver sur la page Facebook “Les Souvenances”. La prise de son est impeccable, les invités sont tous excellents, ne passez pas à côté !
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