Comme tant d’entre nous, Julie D’Amour-Léger, fille de Caraquet, a quitté son Acadie natale pour la grande ville au moment de commencer ses études. Elle s’est d’abord rendue à l’Université de Moncton et, plus tard, à l’université Concordia, à Montréal, pour y terminer sa formation en arts visuels. Elle y entreprend son travail professionnel avant de rentrer au pays, où l’attendait le plus riche chapitre de sa carrière d’artiste. (Note de la rédaction: mis à part son portrait, toutes les photos de l’article sont de Julie D’Amour-Léger).
Silence! On tourne
Pendant 23 ans, Julie D’Amour-Léger a vécu à Montréal. Profession: Photographe de tournages, sur les plateaux de cinéma et de télévision.
Je lui pose la question que vous ne manquez pas de vous poser, vous aussi: À quoi sert un photographe sur le plateau de tournage d’un film, d’une série télévisée ou d’un documentaire?
Le but de la photographie dans un tournage, c’est à la fois de fournir les photos nécessaires à la promotion du film et d’assurer les archives de la production
Travail intéressant, stimulant sans aucun doute, mais après un moment Julie se lasse de la vie dans la métropole, de l’incertitude des contrats, de la course sans fin pour trouver du travail.
L’Esprit de famille
Julie a beau venir d’un grande famille de neuf enfants, son père est seul à Caraquet et il prend de l’âge. En 2007, c’est le déclic et le retour aux sources.
Julie s’installe de nouveau au bord de la Baie des Chaleurs et redécouvre avec émerveillement le contact direct, quotidien et incontournable avec la nature.
Le retour m’a beaucoup inspirée dans ma démarche artistique
Le loisir de contempler
En rentrant en Acadie, en s’installant dans sa petite maison au bord de la mer, la photographe a tout le loisir de se livrer à la contemplation de son environnement. Adieu la frénésie de la grande ville, le bruit constant et les embouteillages. Désormais, ses yeux se portent sur tout ce qui l’entoure, ils se réjouissent de tout.
Vous souvenez-vous? L’an dernier, c’est elle, qui nous avait fourni les photos de notre article sur le merveilleux jardin de l’ami Luc…
En 2014, sept ans après son retour, elle décide de présenter une première exposition photo, très justement intitulée “De ma fenêtre”. Elle y révèle les merveilles de la nature qu’elle contemple au quotidien. Parions que beaucoup de gens n’ont plus tout à fait regardé leur environnement de la même manière après avoir vu ses œuvres.
Trois ans plus tard, c’est aux corneilles patiemment observées depuis sa fenêtre qu’elle consacre une seconde exposition… “Corneilles noir sur blanc”. Saisissant!
La nécessité d’être polyvalente
Mais, bien sûr, quand on est artiste en Acadie, c’est bien difficile de vivre de son art. Ça tombe bien! sa grande amie d’enfance et cinéaste, Renée Blanchar, vit à côté de chez elle. Alors Julie reprend la direction des tournages au gré des projets de Renée: “Les héritiers du Club”, “Nos hommes dans l’Ouest” et son tout dernier film “Le Silence”.
Et puis … la pêche
Entre les tournages, elle contemple la mer, les bateaux qui entrent et sortent du port et la voici prise de passion pour la pêche. Il n’y a jamais eu de pêcheurs dans la famille de Julie. “Juste mon oncle Ruffin Gionet qui construisait des bateaux” explique-t-elle, en s’excusant presque. Mentionnons aussi, qu’elle souffre du mal de mer. Mais, il en faudrait plus pour la dissuader de porter son regard vers l’horizon.
On pratique toutes sortes de pêches dans la Péninsule Acadienne et Julie veut tout voir: la pêche au hareng, à l’anguille, au homard, au crabe. Elle rencontre les pêcheurs, gagne leur confiance, et “embarque”!
C’est un travail de longue haleine, de nombreuses heures de mer, de jour comme de nuit!
Elle y découvre un monde dont elle ignorait tout! L’aspect fantastique la nuit, lorsque les bateaux brillent de tous leurs feux sur l’océan, la camaraderie, l’entraide, le travail épuisant dans le froid…
La pêche c’est aussi les gens qui s’y consacrent, hommes, femmes, blancs et autochtones qui reproduisent au quotidien des façons de faire ancestrales qui la fascinent. C’est le cas de la pêche à l’anguille et de la pêche au gaspereau.
Que faire de plus?
Pour faire honneur à ces hommes et à ces femmes et pour que ses photos soient accessibles à tous, elle se lance dans la publication d’un calendrier des pêches. Modestement en 2020, et grand format pour 2021.
Il s’en publie 500 exemplaires, partis dans le temps de le dire!
Par souci d’inclusion, le calendrier est trilingue: français, anglais et Mi’kmaq.
Julie aimerait que sa contribution aide à nourrir l’intérêt de la population pour la mer, les pêcheurs, leurs savoir-faire et la ressource, si fragile.
Combien de temps encore pêchera-t-on l’anguille? Les stocks de maquereau, de hareng, vont-ils continuer à diminuer? Quel sera l’avenir de l’industrie?
Autant de questionnements pour une artiste solidement ancrée dans son environnement et qui aimerait que son travail serve à quelque chose de plus. Fort heureusement, elle n’est pas seule à s’interroger sur l’avenir de son coin de pays: un collectif, Imaginons la péninsule autrement, y réfléchit aussi !
La photographe et artiste n’a pas fini de nous émerveiller!
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Magnifiques photos, on sent l’appréciation du travail des pêcheurs!
J’ai la chance d’avoir pu acheter ce magnifique calendrier, bravo Julie, votre travail est formidable!
Julie d’Amour-Léger, rien que le nom déjà fait rêver… Merci pour cette nouvelle rencontre…
Très beau parcours Julie! Contente de voir que tout va bien pour toi. Bravo et bonne continuité.
Merci à Françoise pour ce bel article!
Tres bien !
Cette profession apporte plusieurs challenges, surtout dans les Maritimes. Beau travail Julie !
Très bel article où transparaît la passion de cette artiste. Bravo Françoise et bravo Julie.
Merci pour cet article qui décrit bien la difficulté des photographes de vivre de leur passion dans une période où tout un chacun inonde de photos prises avec son téléphone…