Pour ceux et celles qui croient connaître Saint-Jean de Terre-Neuve, la vieille capitale réserve bien des surprises. Depuis des années, la population s’est diversifiée avec la venue de nombreux réfugiés et immigrants. Arrivé lui-même comme immigrant en 1969, René Enguehard a vu d’énormes changements dans sa communauté: dans les années 70 arrivèrent d’abord les réfugiés vietnamiens, puis les réfugiés en provenance de pays totalitaires (Russie, Cuba, Allemagne de l’Est) via Gander, arrêt obligé à l’époque de tous les avions transatlantiques. D’autres groupes ont suivi pour échapper aux situations difficiles dans leur pays ou pour étudier. Il nous fait le portrait de quelques uns d’entre eux qui contribuent, à leur façon, à l’essor de la ville.
Une coupe de cheveu spéciale
S’il y a une chose qui caractérise la majorité des nouveaux Canadiens c’est bien leur désir de réussir et, dans bien des cas, de se lancer en affaires. C’est ainsi que Gustavo Adolfo, infirmier colombien, a eu envie de faire de sa passion une entreprise à part entière.
En 2014, soucieux d’offrir un salon de barbier pour tous ceux (et celles) à la recherche de coupes adaptées à des goûts bien précis, il ouvre “1949”, un salon de barbier situé au centre de la ville, dans le quartier dit “Rabbitown”, vite rejoint par son ami Yaw venu du Ghana.
À l’époque, il dispose de trois sièges très rapidement pris d’assaut par toute la population aux cheveux crépus de la ville qui aime des styles peu connus des barbiers traditionnels et qui est très exigeante sur les coupes qui doivent être littéralement au cheveu près!
Il se passa peu de temps avant que j’apprenne l’existence de ce barbier. Pour moi, ça a été une révélation parce que j’ai découvert un endroit où je peux avoir une excellente coupe, tout en blaguant en espagnol dans une atmosphère agréable.
Encore plus grand
Rapidement, la popularité du salon les pousse à déménager dans un endroit plus vaste (cette fois à 5 minutes de chez moi), dans le petit centre d’achat de la rue Torbay, là même où se trouve ma chiro, mon médecin, mon quincaillier et mon chocolatier favoris. Quelle chance j’ai!
Aujourd’hui, 1949 offre à ses clients des canapés confortables pour attendre son tour et 6 sièges de coiffeurs en plus d’une station shampoing/teinture.
7 barbiers et 2 coiffeuses y travaillent en roulement tous les jours de la semaine, durant les 50 heures hebdomadaires d’ouverture (pour ceux et celles que ça intéresse, les heures d’ouverture sont sur la page Facebook du salon).
En plus, la plupart des barbiers ont un autre travail. Gustavo, par exemple, est infirmier dans le grand hôpital de Saint-Jean. S’ils sont barbiers ou coiffeuses/coiffeurs, c’est surtout par amour du métier.
Des services diversifiés
Les services offerts au salon reflètent la variété de la clientèle qui, en passant, ne se compose pas seulement d’hommes.
Bien sûr on coupe les cheveux, mais on peut aussi vous faire des dessins dans votre coiffure, vous tresser les cheveux ou vous attacher des extensions.
On épile les sourcils, les oreilles, les narines, on offre même le nettoyage facial.
Une atmosphère cosmopolite
Dans le monde de la barbe et des cheveux crépus (ou non), le salon 1949 c’est un peu les Nations-Unies. Rien à voir avec les salons traditionnels où le shampoing était facultatif et la coupe la plus classique possible.
Au salon 1949, afin de bien illustrer leurs origines, tous les clients vont éventuellement piquer une épingle sur leur pays d’origine sur une grande mappemonde accrochée dans l’entrée. Trois continents – l’Afrique, l’Amérique Centrale et l’Amérique du Sud – sont criblés d’épingles.
Pour bien des clients, le salon est un havre de paix où, en plus de se laisser aller dans les mains du barbier, on peut discuter de sa nouvelle vie ou avoir de grandes conversations animées sur les équipes de foot (soccer, si vous préférez) à travers le monde.
Lors des grands matchs internationaux, les écrans télé du salon sont immanquablement branchés sur les sports et les commentaires vont bon train.
L’atmosphère est dynamique avec beaucoup de musique latino puisque plusieurs barbiers viennent de Colombie, de Jamaïque ou encore de Cuba.
Pour apprécier l’ambiance du salon, visionnez ce documentaire réalisé par la chaîne locale CBC (en anglais seulement).
Un salon polyglotte
Naturellement, avec une telle diversité d’origines, le salon c’est carrément la tour de Babel. D’ailleurs le slogan du salon l’affiche clairement: “1949: les Nations-Unies de la coupe de cheveux”!
Gustavo et Yaw les propriétaires viennent respectivement de Colombie et du Ghana. Johanna vient d’Angola, Angela de Cuba, Shawn du Vietnam, Pops de la Jamaïque, Roberto d’Érythrée et, oui!, il y a même un terre-neuvien d’origine, Kieran.
Tout ce monde parle 12 langues différentes:
Même le terre-neuvien est bilingue, il parle français!
1949 Barber shop est un endroit à visiter que vous soyez résident ou visiteur. Dépaysement garanti.
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