Comme bien des peuples à travers le monde, les Acadiennes et les Acadiens élevaient des moutons pour obtenir de la laine et confectionner des vêtements. Comme la comptine le dit, “la laine des moutons, c’est nous qui la tondaine”.
Après que les hommes aient tondu la laine des moutons, les femmes procédaient aux étapes qui mènent à la création de vêtements. Elles la lavaient, la cardaient, la peignaient, la filaient, la teignaient, la tissaient, la portaient, la reprisaient et la jetaient.
C’est plutôt à ces deux dernières étapes qu’il faudrait ajouter un couplet ou deux, car en Acadie, on ne jetait pas souvent du textile. On le réutilisait. Si on ne faisait pas des tapis hookés, on réutilisait la vieille laine en procédant à ce qu’on appelait la « défaisure de laine ».
Pour éviter le gaspillage, les femmes coupaient en petites lanières les vêtements en lainage usés comme les bas, les tuques, les mitaines, les chandails, les pantalons et les foulards.
Ces petites lanières de laine étaient défaites en charpie ou en défaisure de laine. Cette défaisure était ensuite lavée et barattée (oui, dans une baratte à beurre, dont les crochets aidaient à défaire la laine). Cette laine usagée, mélangée avec un peu de nouvelle laine, était à nouveau cardée, mise en rollons, filée, mise en peloton, puis tricotée en mitaine ou en chausson.
Tout ce processus m’a été raconté lors de mes rencontres avec les personnes âgées dans le cadre du projet « Mémoire vivante » du Village historique acadien.
Norbert Savoie de Campbellton et Régina Haché de Saint-Isidore étaient parmi ceux et celles qui me racontèrent cette façon de récupérer la laine des vieux vêtements.
C’est incroyable de penser que les Acadiens étaient tellement pauvres qu’ils devaient suivre toutes ces étapes pour tenter d’économiser la laine qu’ils avaient. Aujourd’hui, nous avons un trou dans un de nos bas et hop! à la poubelle.
Après avoir entendu ces témoignages, nous avons eu l’idée de présenter cette démonstration de « défaisure de laine » dans l’une de nos maisons sur le site historique. Nous avons donc invité madame Haché à nous montrer comment elle faisait ça dans son jeune temps avec sa mère et sa grand-mère.
C’est avec plaisir qu’elle est venue une première fois en 2017, puis une seconde fois en 2019, portant le costume traditionnel acadien pour passer une partie de la journée sur le site historique et expliquer aux nombreux visiteurs ce qu’était la défaisure de laine.
Malgré son âge, madame Haché a maintenant ans, elle était heureuse d’être au Village. Il faut dire qu’elle a toujours eu une ferme et qu’elle a été impliquée dans la vie agricole et communautaire de son village natal de Saint-Isidore. Encore cet été, elle s’occupait de diverses tâches à la ferme, dont le potager et les moutons et elle siège encore sur le comité du Musée de Saint-Isidore en tant que vice-présidente et s’impliqua toute sa vie dans le mouvement des 4-H.