Skip to main content

J’ai rencontré Phil Comeau en 2016 à Saint-Pierre et Miquelon. Il venait y présenter son dernier film “Belle-Île-en-Mer, île bretonne et acadienne” qui sortait tout juste. Depuis, ce film a connu une carrière fulgurante et Phil Comeau a partagé son temps entre la réception de récompenses partout dans le monde et le travail sur la série qu’il présente au FICFA 2018, Vague d’Acadie.

Le feu sacré, Phil Comeau il l’a, c’est incontestable. Il brûle de l’intérieur. C’est par le cinéma qu’il s’exprime. C’est l’Acadie qui le porte et l’attise.

En tout cas, c’est pour l’un et pour l’autre qu’il se lève le matin. Ça se voit à l’œil nu.

1. Les Gossipeuses

Malgré des budgets annuels très serrés alloués à la création cinématographique par le gouvernement provincial du Nouveau-Brunswick et par le gouvernement fédéral, le cinéma acadien existe aujourd’hui. Il se porte même de mieux en mieux. ” Les budgets tournent autour de 2.5 millions de dollars, une goutte d’eau. Mais quand on travaille dans le cinéma, on passe son temps à rechercher de l’argent. C’est ce qui manque en Acadie… aussi ! Pourtant il y a plus de productions destinées à la télévision ce qui permet maintenant à un vingtaine de personnes de vivre en tant que réalisateur ou réalisatrice, et ça c’est récent.”

En 43 ans de carrière, Phil Comeau est l’un de ceux qui ont suivi toutes les évolutions du 7ème art acadien.

Il a 20 ans, en 1978, quand il crée son second film Les Gossipeuses qui fera date. C’est, encore aujourd’hui, l’une des références du cinéma acadien, la preuve : Les Gossipeuses est disponible intégralement sur le site de l’Office National du Film. On appelle ça un “film culte”, à tel point qu’il y a même des fans qui le visionnent sans le son : ils récitent les dialogues qu’ils connaissent par cœur, enfin par “Tcheur“. S’ils y arrivent, c’est surement qu’ils sont nés du côté de la Baie Sainte-Marie en Nouvelle-Écosse, comme Phil Comeau lui-même, natif de Saulnierville.

Comment ce film a-t-il eu un tel succès alors qu’il est joué dans un français difficile à comprendre ?  “À l’époque j’ai fait ce film pour les gens de la Baie Sainte-Marie mais aussi parce que je pensais que c’était important que les spectateurs puissent entendre d’autres accents. Le film a été sous-titré en français standard mais les retours que j’ai eu c’est que les gens ne les lisaient plus après quelques minutes. Leur oreille se faisait à l’accent.” Et puis les commères du film, inspirées des tantes du réalisateur, sont franchement drôles aussi, il faut bien le dire.

Premier gros succès.

Suivront bien d’autres films et quelques années plus tard, en 1994, “Le Secret de Jérôme” (qui sera diffusé à Saint-Pierre et Miquelon sur SPM1ère le 20 décembre 2018.) L’histoire d’un personnage de la Baie Sainte-Marie troublant et mystérieux. Un naufragé recueilli en 1863, les jambes amputées, muet. Jusqu’à sa mort, les rumeurs les plus folles auront couru à son sujet.

2. Les Acadiens de Belle-Île-en-Mer

Avec les années et la notoriété, Phil peut se permettre de faire ce qu’il veut et de prendre des libertés impensables quelques années auparavant.

Est-ce à cette liberté totale revendiquée pour l’écriture du scénario que l’on doit la délicatesse et la profondeur du film “Belle-Île-en-Mer, île bretonne et acadienne” ? A mi-chemin entre le documentaire et “le long poème d’amour”, on y raconte en 26 minutes comment les bretons de Belle-Île-en-Mer vivent le fait d’être les descendants des acadiens envoyés en France après la Déportation.

J’ai rencontré Maryvonne Le Gac, tête de file des Acadiens de Belle-Île-en-Mer. Personne-ressources pour Phil Comeau à l’époque du tournage, elle a beaucoup participé à la préparation de ce documentaire.

 

Voyez la bande annonce :

La carrière de ce film est éblouissante:

  • Traduit en 9 langues
  • Diffusé dans 151 pays par le réseau de TV5 Monde
  • 26 prix et 38 autres sélections à des festivals : Prix du Jury au  Festival International du Cinéma Francophone en Acadie 2016 (dès sa toute première diffusion publique) et depuis … Meilleur court métrage, meilleur documentaire, meilleure photo etc etc et ce dans le monde entier ! C’est à ce jour le film acadien le plus titré.

 

3. Vague d’Acadie au FICFA 2018

“L’Acadie est moderne”, voilà en trois mots ce qui pourrait résumer le message que Phil Comeau travaille à diffuser.

Souvent pour en parler, on passe par son histoire (douloureuse), on utilise des mots comme résilience, résistance. Il est beaucoup question de généalogie, de centres de recherches etc… Et pourtant, l’Acadie n’est pas une momie, elle vit et se développe dans son époque avec un nombre d’artistes au kilomètre carré qui laisse pantois.

La création et les arts y sont mis à l’honneur et ça, c’est une stratégie payante, pour l’avenir mais aussi pour aujourd’hui. Les Arts visuels, la musique de tous les genres, l’écriture, la poésie, le théâtre (les ligues d’improvisation !!!), le cinéma, on vient de le voir, sont en effervescence à l’année longue.

Phil a tout récemment été ébloui par la dernière création des Hôtesses d’Hilaire, de Moncton. Un opéra-rock, qui tourne en ce moment, Viens avec moi. Son autre coup de cœur du moment va à Mario Doucette un peintre qui revisite des scènes de la Déportation.

C’est tout ce bouillonnement là qui a conduit Phil Comeau à réaliser Vague D’Acadie, qui vient tout juste d’être présenté au 32ème FIFCA, qui se tient ce moment à Moncton et jusqu’au 23 novembre 2018.  Ce film nous montre la variété des talents musicaux qui s’épanouissent ici et qui s’exportent aussi très bien et donne l’occasion aux spectateurs mais aussi aux gens de l’industrie de s’interroger sur un tel dynamisme et de

 

C’est une façon de réunir les artistes qui rayonne dans la Francophonie, de donner un autre éclairage aux artistes qui la font connaître. “Il s’agit de 20 portraits. 15 musiciens solo et 5 groupes, tous compositeurs. J’ai voulu uniquement des artistes qui écrivent leurs textes. Des gens avec une vision.”

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Patricia Detcheverry

Après 10 ans en régie publicitaire, je me suis lancée dans l'hôtellerie et j'ai vécu (encore) 10 ans au rythme des saisons touristiques. Freelance depuis 2017 j'allie mon regard de femme de l'Atlantique et mes compétences en communication pour faire connaitre ma région. Ce que j'aime par dessus tout ? Faire découvrir les petits endroits paumés où personne ne va, les petites routes ignorées, les bouts du monde et les gens, toujours les gens !

Publier un commentaire